jeudi

Manifestation Paï-Paï


 SPÉCIALE "INITIALES BB"
une histoire très pop'n'roll
Avec l'Association Paï-Paï
Samedi 29 septembre 21H00
Dimanche 30 septembre 14H00
Présentation du livre
ambiance seventies, musique, vidéos...

PAI-PAI : 49, rue du Pré-Pigeon - Angers





mardi

Chapitre 16 - LOLA L.O.L.A.




"Il est frappé par la présence magnétique d'une jeune fille, longue liane fine et souple, qui déambule avec aisance et légèreté... Elle est l'image de la grâce, de la candeur, mais dégage une certaine assurance conférée par la certitude d'être à sa place en ce lieu, comme elle doit l'être partout, malgré son extrême jeunesse.
C'est ainsi que sont les adolescentes maintenant, nettement plus matures, pense l'homme brun qui la détaille en esthète, fauché par une émotion profonde non identifiée.
Elle porte une jupe très mini sur des jambières en dentelle noire et des ballerines du même ton. Ses longs cheveux bruns aux reflets rouges ondulent et sont répandus sur un T-shirt moulant à paillettes, on lui devine une poitrine délicate. L'ensemble pourrait paraître de mauvais goût sur n'importe qui, sauf sur elle...
Elle s'appuie d'une épaule au chambranle ouvragé d'une porte, elle lève à sa bouche une coupe de champagne qu'elle lape ingénument.
Une Lolita délicieusement provocatrice... Irrésistible, irréelle créature de manga...
L'homme brun se dit que celui qui osera l'approcher ne pourra faire autrement que de l'emporter. Réalise-t'elle la jungle où elle se trouve ? Claude s'est approché de lui pour balancer d'une voix égrillarde :
- Intéressante n'est-ce pas ? Cette minette doit-être une apprentie chanteuse en quête de pygmalion... Qui l'a invitée ?
- Je ne sais pas... Elle est différente des autres greluches...
- Tu parles ! Encore une qui se tape l'incruste et vient tenter sa chance... Quelqu'un va la prendre en main, gaulée comme elle est... J'essaierai peut-être tout à l'heure si elle s'est pas fait embarquer. Pour le moment, j'ai mieux à faire que de tester les nymphettes, Ophélie vient d'arriver...
- C'est ça, je ne te retiens pas...
L'homme brun fait le tour du somptueux appartement lambrissé, situé au dernier étage de l'immeuble occupé par « Planet Prod ». Il discute avec des gens de la profession musicale, artistique, médiatique... Il est en représentation. Il écoute les sollicitations, écourte les félicitations, évince les importuns, évite les hystériques... Il garde un œil sur la divine gamine... Ce soir, il est las de tout ce simulacre d'existence auquel il souscrit depuis qu'il a perdu la foi.
Tout le monde ici a remarqué l'adorable esseulée, les hommes lui jettent des regards gourmands, les femmes des œillades jalouses. Cela va mal finir pour elle...
Il se décide à l'aborder, si ce n'est pas lui, un autre le fera... Il sent qu'il ne le supportera pas. Il veut la connaître. Cela devient urgent, impératif, vital. Elle a peut être besoin d'être renseignée, rassurée...
Elle le voit venir, semble même l'attendre, elle lui plante un regard droit, dur, noir...
Il prend un direct au cœur, tousse, est obligé de mettre une main devant sa bouche.
Elle le contemple, l'air ironique, un charmant sourire trousse ses lèvres et lui dessine des fossettes...
Il tente avec une certaine timidité :
- Excusez-moi, mademoiselle, puis-je vous aider?
- Possible...
- Je ne vous ai jamais vue...
- Je ne suis pas d'ici...
Un accent chantant perce dans ses paroles et il s'en amuse :
- En effet...
- Vous vous moquez ?
- Mais non, c'est charmant... Quel est votre nom?
- Lola...
L'homme est pris d'un léger vertige, il se ressaisit.
Elle fredonne :
- « L.o.l.a... Lola... And I drink champagne and dance all the night... ».
II éclate d'un rire fantastique qu'elle reçoit avec joie et fureur, c'est bien lui, le diable de séduction signalé. Il ne perd rien pour attendre...
- Bravo chérie ! Tu connais tes classiques...Tu me plais...
- N'est-ce pas ? susurre-t'elle.
- Tu sais, bien sûr, que cette Lola n'était pas celle qu'elle paraissait être...
- Tout comme moi...
Il la scrute, intéressé :
- Vraiment...
- Vous voulez voir ?
Lola darde des yeux brûlants sur l'homme qui baisse le regard mais le replace très vite sur elle. Il est ému au-delà du possible. Une autre rencontre lui revient... Décalée, mais d'une intensité comparable. La rencontre de sa vie. Quel est ce nouveau tour diabolique que lui réserve le destin ? Le train de la félicité passerait-il deux fois, ou bien est-ce celui de la rédemption ? Il est bouleversé mais méfiant.
Pourtant, la jeune fille l'attire incroyablement. Il la détaille lourdement, ce regard, cette bouche, ces cheveux, ce maintien... Tous ces signes qui le tuent, c'est un doux et tendre supplice en forme de souvenance vibrante...
D'où vient-elle ? C'est invraisemblable... Cette gamine lui rend plus cruelle son actuelle solitude de nanti désabusé d'un monde superficiel. Il réalise qu'il n'en peut plus de son vide existentiel. Plutôt crever, ici, maintenant, que de supporter davantage cette mascarade... Elle... lui indique le point de rupture.
Lola le contemple, touchée, sa détermination vengeresse se craquèle... Ce type dégage un charme flamboyant tempéré par une mélancolie blasée... Il est farouchement séduisant avec sa chevelure noire en pétard, striée de fils gris et son rire en cascade. Elle se surprend à être fière de ça...
Elle devine... Mieux, elle capte tout en un éclair... Avec sa lucidité, son intuition, sa sensibilité. Le grand cirque de l'attraction, de l'amour, de la répulsion... Et l'amour qui ne meurt pas, qui ne peut pas mourir, qui ne veut pas mourir. Elle aussi est faite de cette matière... Amour, haine, attirance, rejet...
Toutefois, elle le tourmentera jusqu'au bout, elle murmure :
- Vous ne dites plus rien, vous vous sentez mal?
- Je réfléchis...
- Super ! Un homme intelligent ici ! Vous ne vous êtes pas présenté...
- Nicolas, Nicolas Toulouse...
- Ah ? Ça tombe bien, c'est vous que je cherche...
- Pardon ?
- C'est vous que je cherche...
- Pourquoi ? Tu as besoin de moi ?
- Non...
- Tu chantes ?
- Oui... Non...
- Je peux t'aider, si tu veux...
- Non...
- Pourquoi me cherches-tu, alors ?
Lola assène avec une tranquille assurance :
- Pour vous tuer...
Elle pointe de son index le cœur de Nicolas :
- Pour vous tuer, là...
- Qui es-tu ?
Il tremble, il blêmit...
Elle continue :
- Pour vous briser le cœur...
- Il l'est déjà...
- Non, pas complètement, il bat toujours... La preuve, vous souffrez...
- Qu'en sais-tu ?
- Ça se voit...
- Arrête ce jeu...
- Je veux vous détruire...
- Pourquoi, chérie ?
- Comme vous avez détruit ma mère...
Le coup est terrible. Il chancelle, passe la main sur son front, sur sa poitrine. Il peine à respirer..."



lundi

Chapitre 15 - NISSA LA BELLA - extraits...


"Je suis tombée amoureuse du « Vieux-Nice », village dans la ville, j'en sillonne les ruelles tortueuses aux façades ocre jaune, animées d'envols d'escaliers, je m'égare dans son dédale coloré, odorant, sonore et cosmopolite. J'ai déniché un trois pièces au dernier étage d'un immeuble ancien, comportant un balcon en fer forgé, des baies munies de volets persiennés, peints en vert, qui laissent diffuser la lumière en rais obliques. L'habitat vernaculaire de la vieille ville, de par son implantation resserrée, protège du soleil ; les placettes, percées de fontaines, sont des refuges d'ombre et de fraicheur. De mon appartement, j'ai vue sur la Montagne du Château et la Baie des Anges.
J'ai coutume de vadrouiller sur la plage aux galets roulants. Je m'assois face à la mer, mes yeux se portent sur le camaïeu bleu de l'horizon, là où le ciel se fond dans l'eau, je me sens minuscule, à l'extrême bord de mon continent..."


"Au jardin du Vieux-Château, un mini festival de musique populaire est donné une fois par an, au mois de mai. J'y vais rarement... Sauf cette fois car la fille d'Antoine s'y produit avec son groupe et Lola, qui vient d'avoir onze ans, veut voir jouer sa baby-sitter...
On accède au promontoire boisé, qui offre une vue grandiose sur la vieille ville, la Baie des Anges et le port, par une allée goudronnée ou, plus directement, par un sentier qui serpente dans la rocaille.
Une foule familiale et endimanchée s'y presse, une estrade est dressée pour le spectacle et des stands de jeux sont installés pour les enfants. Ma gamine cours d'une attraction à l'autre, elle a retrouvé des camarades d'école. Elle porte une robe claire volantée, petite elfe au corps menu et bronzé dont les longs cheveux noirs ondulent et virevoltent dans le dos."

"Je surveille Lola qui attend son tour près du chariot aux couleurs vives du marchand de glaces ambulant. Elle reçoit un cornet débordant de crème glacée rose et jaune qu'elle commence à lécher avec application. Je la hèle et elle s'élance avec son trophée. A ma gauche, une silhouette noire s'extraie de la masse humaine compacte et mouvante, elle m'est si familière qu'il me semble l'avoir quittée depuis quelques secondes... Elle me précipite en arrière pulvérisant l'espace temps des années qui nous séparent.
Jeans râpés, blouson élimé, cheveux noirs en pétard, allure vive et décidée, le garçon n'a, apparemment, pas changé. Je me pétrifie, transformée en statue de sel, respiration coupée, cœur en déroute...
Sa trajectoire va croiser celle de Lola qui file me rejoindre... J'assiste, impuissante, au télescopage. La fillette, déséquilibrée, laisse choir sa glace aux pieds de l'homme en noir qui la rattrape aux épaules. Tous deux contemplent le cornet éclaté et son contenu répandu...
Nicolas a gardé une main sur Lola, buste penché, il lui parle, elle acquiesce de la tête et ils se dirigent vers le vendeur de glaces."

***
J'ai pris mes dispositions pour me libérer momentanément de mes obligations professionnelles. La moins heureuse était Lola, qui appréciait peu mon départ et de loger chez ses grands-parents :
- Tu pars combien de temps ?
- Trois semaines...
- Je viens avec toi...
- Et l'école ?
- Bof...
- Quoi, bof ?
Il était hors de question qu'elle me suive, je lui ai proposé de me rejoindre pour les vacances de Noël, cela correspondait à son concours de musique, elle était sélectionnée et j'en étais fière. Elle s’entraînait sérieusement avec sa guitare sèche, répétant des chansons d'Emmylou Harris, de Linda Rondstadt... Avec ses longs cheveux bruns, son petit visage concentré, ma fille ressemblait à une jeune prêtresse folkeuse, sa voix était haute et claire, s'éraillant parfois, son jeu net et précis. J'étais impressionnée... Je pensais que son père ne l'aurait pas reniée et serait tombé à genoux devant tant de grâce virginale, lorsque perchée sur son tabouret, elle me proposait une chanson :

- Ecoute-bien maman, c'est « To Daddy » de Emmylou...
« Mama never seemed to miss the finer things of life
If she did she never did say so to daddy
She never wanted to be more than a mother and a wife
If she did she never did say so to daddy
The only thing that seemed to be important to her life
Was to make our house a home and make us happy
Mama never wanted any more than what she had
If she did she never did say so to daddy... »
Le réalisme de ces paroles m'avait fauchée, j'avais détourné la tête pour qu'elle ne me voit pas pleurer. Ma Lolita frôlait les étoiles, si proche d'atteindre sa révélation. ».




TEASER présentation + Vidéo...