samedi

Chapitre 7 - BABY BLUE TEST - extraits...



"La demeure est ravissante et fatiguée, meublée de bric et de broc, de canapés aux coussins défoncés, de vieux bahuts et d'armoires de guingois... Les escaliers craquent, les portes grincent, les planchers sont recouverts de tapis décolorés et élimés. Des grains de sable s'insinuent dans les moindres recoins, dans les rainures de parquet. Le nez hume des odeurs mêlées de pins parasols, d'iode, de vinaigre, de fleurs séchées, de confiture, de cire....
L'ensemble est pittoresque et dégage un charme suranné et mystérieux sur l'ancienne côte de contrebandiers..."
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"Nous occupons un étroit lit-bateau au cœur d'une chambrette aux murs lambrissés, donnant sur la mer. Nous dormons fenêtre ouverte sur la fraîcheur nocturne, bercés par le roulis des vagues, le vent anime les voilages blancs. Les mouettes impertinentes nous réveillent tôt le matin, ce qui ne m'empêche pas de paresser au lit.
Le temps s'est arrêté dans ce havre de paix et de douceur, à l'écart des contraintes quotidiennes. Cette parenthèse enchantée est un pur bonheur de complicité avec Nico. Je sais que la période est éphémère, elle n'en a que plus de prix..."
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Au bout du temps fatidique nous nous penchons sur le résultat. Je compare la couleur de mon éprouvette aux deux possibilités du mode d'emploi. Un cercle bleu surnage dans le tube, et cela signifie VOUS ETES ENCEINTE...
Nous nous regardons bouche bée.
Rachel s'écrie :
- Merde ! T'es enceinte !"
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"Ma mère m'assomme de conseils alimentaires et d'hygiène, indispensables pour une femme enceinte...
Le lendemain matin, nous faisons le marché Saint-Martin où elle se ravitaille, elle y sélectionne les légumes et les fruits les plus beaux, exige la viande la plus tendre et des fromages bien faits. Je l'aide à porter les paniers en osier, comme la fillette d'autrefois... J'insiste, je ne suis pas invalide.
Marie discute avec les commerçants qui me gavent avec leur dégustation de produits du terroir. Elle salue quasiment tout le monde, et je remets les visages vieillis des commères de mon enfance.
- Oh ! La petite Béatrice ! Comme elle poussé ! Comme elle a bonne mine ! s'exclament-elles à ma mère, comme si elles ne pouvaient s'adresser directement à moi..."
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"L'Eldorado est un ancien théâtre de trois-cents places avec balcons. Les lumières de la salle comble viennent de s'éteindre. On n'entend plus que des chuchotis percés d'appels impatients. Je respire difficilement à travers la fumée acre des cigarettes et des joints. Prise d'un léger vertige de fatigue et d'un haut-le-cœur, j'appuie ma tête contre l'épaule de Nico. Les autres membres des Dirty's sont disséminés dans la place. Au bout de quelques minutes la tension se densifie. Des fumigènes s'élèvent de la scène alors que retentit l'intro du fameux hymne « New Church », les musiciens se placent et le chanteur surgit, grimaçant et sautillant, grimé, très ébouriffé, bardé de cuir noir et de breloques. La batterie claque, les guitares bondissent. Le groupe propose un rock gothic étourdissant et mélodique avec force cymbales et guitares saturées qui tourbillonnent, s'entrelacent et se superposent... Le chanteur caracole et prend des poses, fait des bonds insensés, escalade les amplis... Le concert m'envoûte, je me laisse embarquer par la voix profonde et écorchée de Stiv Bator...
« They gonna git'cha when you're on your own
The silence of conspiracy
Slaugthered on the altar of apathy
You gotta wake up from your sleep
'Cause meek inherits earth... six feet deep
Open your eyes see the lies right in front of ya
Open your eyes... »
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"J'accède par un chemin tortueux à des loges délabrées et taggées. Les garçons descendent des bières, vautrés sur des bancs. Nico discute avec un type singulier. De taille moyenne, blafard, maigre, les cheveux mi longs et noirs, en pantalon de cuir et longue veste foncée, il parle anglais avec une voix cassée et une intonation nasillarde. Nico me fait signe d'approcher et me le présente :

- Johnny T, bébé...
Le garçon porte des lunettes noires qu'il soulève, son regard flou devient perçant, il lâche dans un bref rictus :


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